Quelques remarques sur l’islamisme et le terrorisme islamiste
Classement :
Certains termes sont utilisés de façon particulière :
de signification assez floue, quoique reliée à un sens fondamental facilement
perceptible, ils visent surtout à disqualifier ou à discréditer un adversaire,
voire à lui faire peur.
Aux États-Unis dans les années 1950, par exemple, le terme
de « rouge » était largement utilisé pour amalgamer quelqu'un à
l’horreur absolue qu’était le communisme pour beaucoup d’Américains (le mot
contenait en fait une menace latente d’action non verbale).
« Islamophobie »
/ « anticommunisme »
L’accusation
d’anticommunisme
Pendant plusieurs décennies, les communistes français ont utilisé
les termes « anticommunisme » et « anticommuniste »
(parfois augmenté d’un qualificatif : « primaire »,
« viscéral ») pour qualifier certains de leurs adversaires, pas tous ceux
qui étaient en désaccord avec le communisme, seulement ceux qui franchissaient
certaines limites : parler des « camps soviétiques » notamment,
ou d’une façon générale, de la répression, de la police politique ; de la
famine survenue en Ukraine dans les années 1930 ; etc. Si on se limitait à
des critiques abstraites, on pouvait éviter de tomber sous le coup de
l’accusation d’« anticommunisme ». Cette accusation faisait de sa
victime un individu douteux, vendu à des intérêts occultes (les services
secrets américains), infréquentable par les communistes et par leurs
sympathisants, ainsi que par « les gens honnêtes », qui ne voulaient
pas se mettre mal avec eux. L’usage du terme a survécu à la déstalinisation de
1956, alors même que Khrouchtchev avait reconnu l’ampleur de la répression à
l’époque stalinienne. Mais dans les années 1970, la répression brejnévienne,
quoique incomparable à celle de l’époque stalinienne, ne devait pas non plus
être évoquée de façon trop claire. La puissance du terme s’est affaiblie au
cours de cette décennie : de plus en plus de gens l’assumaient désormais sans
difficulté, ou s’en faisaient un honneur. Par exemple, Jean-François Revel.
Mais la gauche non communiste, soucieuse de l’alliance entre le PS et le PCF, y
était encore sensible (cf. l’affaire Soljenitsyne à Apostrophes en 1976).
L’usage a cessé dans les années 1980, alors que l’URSS était en train de
sombrer en Afghanistan puis en Europe.
Quelle signification avait-il ? « Anticommuniste »
n’était pas synonyme de « opposé au communisme » (les communistes
français acceptaient que dans un pays occidental, tout le monde n’adhère pas à
leurs points de vue), mais « opposé au communisme de façon inacceptable
pour les communistes » ; il correspondait à une sorte de pouvoir
idéologique que détenaient alors les communistes dans la société française,
fondée sur leur ancrage ouvrier, mais aussi sur leur influence dans les milieux
intellectuels et universitaires.
L’accusation d’islamophobie
Depuis quelques années (indépendamment d’usage antérieurs
plus ou moins lointains), les termes « islamophobie » et
« islamophobe » est utilisé par des membres d’organisations
islamistes (c'est-à-dire d’organisation politiques liées à une certaine vision
et instrumentalisation de la religion musulmane) pour « stigmatiser »
un certains nombres de gens comme des adversaires, voire des ennemis.Une
organisation s’est même explicitement spécialisée dans la lutte contre
l’islamophobie : le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) de
Marwan Muhammad.
Comme avec « anticommunisme », il s’agit de
discréditer la personne désignée comme « islamophobe ».Sur quoi se
fonde le pouvoir de discrédit du mot « islamophobie » ?
Principalement sur le fait qu’il contient de façon non explicite, mais
effective, une accusation de « racisme », assez curieuse, puisqu’il
n’est pas question de « race » ; parfois cette accusation est
explicite dans la formule, « raciste et islamophobe », dont la signification
réelle est « raciste parce qu’islamophobe ». Or qui dit
« raciste » dit « extrême droite », donc l’islamophobe est
(subrepticement, parfois explicitement) amalgamé à l’extrême droite, au
« fascisme ».
Le champ d’application du mot « islamophobie »
est plus vaste que celui d’ « anticommunisme » : seuls ceux qui
disent du bien de l’islam et ceux qui n’en disent rien (et qui n’en pensent pas
plus), peuvent y échapper. D’autre part, le mot « islamophobie » est
utilisé par toutes sortes de gens qui ne sont ni islamistes, ni même musulmans ;
un nombre assez élevé de journalistes ou d’hommes politiques l’utilisent désormais
sans y prêter plus d’attention (sans peut-être lui donner subjectivement de connotation
raciste), ce qui accroit notablement son pouvoir de nuisance.
Les actes relevant de l’incrimination d’
« islamophobie »
Contrairement à « anticommunisme », qui ne visait
que des adversaires « non récupérables » du communisme, le mot
« islamophobie » est applicable à toutes sortes de pratiques, qui
peuvent être anodines ou extrêmement graves : toute expression d’une
réserve sur l’islam peut être taxée d’islamophobe ; ainsi que des faits
plus « graves » d’ordre idéologique (dire que « l’islam est la
religion la plus con du monde ») ; des infractions d’ordre délictuel
(mettre du jambon dans la boîte aux lettres d’une mosquée ; se moquer de
ou insulter un ou une musulmane) ou criminels (dégrader matériellement une
mosquée ; agresser physiquement un ou une musulmane ; tirer à la
kalachnikov sur une groupe de musulmans ou se servir d’un camion pour
écrabouiller un groupe de musulmans) ; des infractions d’ordre
« théologique », non reconnues comme telles en France (dessiner de
façon moqueuse ou vulgaire le prophète Mahomet, alors que la religion musulmane
en interdit la représentation).
Le regroupement de tous ces faits dans la catégorie
« islamophobie » permet de tout amalgamer avec ce qui est
potentiellement le plus grave (tirer à la kalachnikov, utiliser un
camion-bélier), ce qui est d’autant plus intéressant que des faits aussi graves
ne sont jamais survenus en France à l’encontre de groupes (spécifiques) de
musulmans.En quelque sorte, celui qui dit « Ouais, l’islam, moi, c’est pas
mon truc » peut être qualifié d’« islamophobe », tout comme
celui qui entrerait dans une mosquée et abattrait les personnes présentes (ce
qui ne s’est jamais produit en France, plaise à Dieu qu’il en aille toujours de
même !).
Cet amalgame est évidemment absurde : il y aurait lieu
de nuancer entre les positions de chaque non musulman envers l’islam. Le mot
« islamophobie » évite toute nuance. Cela lui donne une grande
facilité d’emploi.
Lutte
contre l’islamophobie et violence terroriste
Il existe une grande différence entre
« anticommunisme » et « islamophobie » :c’est que dans
le cas de la France et des autres pays occidentaux, la dénonciation par les
communistes de l’ « anticommunisme » d’une personne était purement
idéologique et rhétorique (il n’en allait pas de même en URSS et dans les
démocraties populaires). Cela pouvait avoir des effets sociaux, mais, a priori,
« il n’y avait pas mort d’homme ».
En revanche, la lutte contre l’ « islamophobie »
comporte un volet violent, que certains qualifient de « terroriste ».
Le cas emblématique est l’attentat du 7 janvier 2015 contre
la rédaction de Charlie Hebdo, organe de presse qui depuis au moins une dizaine
d’années, était considéré comme un phare de l’ « islamophobie » en
France, voire dans le monde entier. Le reproche fait à Charlie Hebdo était
d’avoir représenté à plusieurs reprises le prophète Mahomet et d’avoir fait (ou
eu l’intention de faire) de l’humour à son sujet ; dans certains cas, on
avait affaire à des représentations que le fameux sociologue Emmanul Todd a
qualifié d’ « obscènes ». Plusieurs personnes ont été
« exécutées » par les abjects frères K. pour ces raisons.
Il y a eu de nombreux autres attentats (depuis 2012, année
de la virée meurtrière de l’ignoble M. M., « Qu’il soit Maudit »),
dans lesquels l’« islamophobie » des victimes est moins avérée :
rien ne prouve que le père Jacques Hamel, que les fidèles de la cathédrale de
Nice, que les promeneurs du 14 juillet 2016 à Nice, que les spectateurs du
Bataclan aient été « islamophobes ». Leur « islamophobie » est
en quelque sorte métonymique : la France est un pays
« islamophobe », donc toute personne se trouvant en France doit
l’être. Le fait d’être des chrétiens a sans doute accentué la
« culpabilité » des victimes de la cathédrale de Nice et de
Saint-Etienne-du-Rouvray, en vertu d’une analyse islamo-terroriste selon
laquelle « chrétien = croisé ».
Avec la
décapitation du professeur Samuel Paty par une crapule tchétchène,
l’islamo-terrorismes est revenu à la lutte pure et dure contre l’ « islamophobie » :
Les
conséquences du terrorisme islamiste
Quels que soit leurs motifs, la répétition des attentats
produit évidemment un effet plutôt négatif, incite au minimum à la
prudence ; cela amène les gens à réfléchir à deux fois avant de dire ou
d’écrire quoi que ce soit au sujet de ou en rapport avec l’islam (« Vous
pouviez vous exprimer librement sur tout, à condition de ne pas parler de
l’islam, de l’islamisme, de la religion musulmane, de ne pas douter que
« l’islam soit une religion d’amour et de paix », et qu’Erdogan soit
le démocrate le plus sincère du monde ».)
En conséquence, il me semble que les terroristes islamistes
sont objectivement des soutiens à la
« lutte contre l’islamophobie » menée par les organisations
islamistes légales, notamment par le CCIF.
En disant cela, je n’accuse pas le CCIF ni les autres
organisations islamistes légales d’avoir le moindre lien organisationnel avec
les cellules ou réseaux terroristes d’Al Qaida ou de Daech. Je pense simplement
qu’elles tirent profit des actions terroristes pour promouvoir leurs
« petites boutiques antiracistes ».
Lorsque M. Marwan Muhammad proclame que « les
musulmans sont aussi qualifiés que tous autres pour définir l’identité de la
France » (ou quelque chose d’approchant), l’arrière-plan des attentats
donne à ses paroles un poids bien supérieur. De même, lorsque quelqu'un dit
« Je suis contre les attentats, mais ils n’auraient pas dû faire des
caricature du prophète », cela rappelle que la menace d’un attentat existe
toujours pour le « contrevenant » futur, qu’il faut tout de même
tenir compte des terroristes et ne pas se mettre en infraction vis-à-vis de
l’islam.
Du reste, les islamistes et même la plupart des musulmans,
évitent de trop s’engager dans la voie de la condamnation des attentats. La
raison est qu’il y a chez nombre de musulmans une certaine fascination pour leurs
auteurs, et que ce groupe fait peser une menace de réaction sur les simples
musulmans (avec qui ils sont liés par des liens quotidiens) mais aussi sur les
islamistes dont l’influence repose sur une certaine radicalité rhétorique (même
ceux qui subjectivement sont réellement opposés au terrorisme).
Cette faiblesse de la réaction des islamistes par rapport
au terrorisme est confortée par l’attitude de certains milieux non musulmans qui
en rajoutent dans la lutte contre l’islamophobie, voire dans une certaine
« justification » du terrorisme (pétition Badiou-Ernaux établissant
un lien entre ce terrorisme et la politique étrangère française ; non pas
qu’il n’y ait pas un tel lien, mais alors, il faudrait demander des comptes au
gouvernement français et non pas diffuser une pétition aux effets
confusionnistes, justifiant objectivement des attaques par exemple contre des
fidèles catholiques, opération totalement inepte par rapport à des enjeux
géostratégiques, sans parler de son abjection morale.
Islamisme et fascisme
L’idée exprimée par Mme Autain, Clémentine, que « la France est
dans une situation préfasciste » signifie que, selon elle, les musulmans
vivant actuellement en France sont menacés dans un proche avenir par des
« ratonnades » venant de milieux islamophobes d’extrême droite (avec la complicité du gouvernement et d'une bonne part de la population). Un certain nombre de militantS islamophiles présentent les musulmans vivant actuellement en France comme se trouvant dans la situation des Juifs en France dans les années 1930.
En réalité, s'il existe un phénomène
« fasciste » en France, il réside dans l’association objective entre les
revendications islamistes légales et la perpétration d’une violence terroriste islamiste.
Le soutien objectif (indépendant de toute complicité
avérée) du terrorisme islamiste à l’islamisme permet en effet d’établir une analogie
entre la situation actuelle dans les pays d’Europe occidentale, surtout en
France, et la période des débuts du fascisme en Italie, à l’époque antérieure à la prise
du pouvoir où les commandos fascistes exerçaient une violence quotidienne à
l’’encontre des syndicats, des maisons du peuple, etc.
Mais les
commandos fascistes, les commandos de squadristi,
étaient une composante (illégale, mais pas du tout clandestine), du parti
fasciste ; en réduisant à néant la capacité de réaction de la gauche, ils
ont permis d’imposer à la droite plus ou moins complice l’accession au pouvoir
de Mussolini en 1922 (les SA ont joué un rôle analogue en Allemagne, mais l'idéologie a joué un beaucoup plus grand rôle en Allemagne qu'en Italie).
La violence
islamiste (qui s’exerce aussi à travers les « manifestations » (vociférantes) de « musulmans
indignés » au Pakistan et en d’autres lieux plus éloignés) n’amènera évidemment
pas un « parti islamiste » (qui n'existe pas) au pouvoir après une « Marche sur
Paris », mais elle permet dès maintenant d’imposer une emprise islamiste
sur l’espace médiatique en restreignant la « liberté
d’expression » : interdiction de facto des « caricatures de
Mahomet », par exemple (puisqu’il existe une de facto une menace de mort
non négligeable, comme le montre le cas de Samuel Paty, dont l’intervention
n’était pas pourtant même pas antimusulmane).
Jusqu’à quel
point ce contrôle de la « liberté d’expression » peut-il
s’exercer ? Il peut être très élevé dans les salles de classe, à
l’encontre d’énoncés considérés comme « antimusulmans » (théorie de
l’évolution, par exemple). Dans la société française, telle qu’elle est
actuellement, il ne parait pas possible que les islamistes arrivent à
« interdire de facto » la présence de la théorie de l’évolution, ou
même l’expression de l’athéisme. Sur ce dernier point, on peut cependant avoir
des doutes.
Est-ce que
l’expression de l’athéisme n’en viendra pas à être considérée comme une
« provocation inutile » par des « gens de gauche »
« responsables » ?
Est-ce que la
gauche islamophile ne pourrait pas en venir à dire : « Qui a besoin
de dire « Dieu n’existe pas ! » ? D’ailleurs en est-on bien
sûr ? »). Et que se
passerait-il si les terroristes revendiquaient lors de leurs attentats l’abrogation
des lois « islamophobes » (celle de 2010 sur la bourka et celle de
2004 sur les signes religieux à l’école) ?
Mise à jour :
Révision : 23 novembre 2020
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 102. Anticommunisme, islamophobie, fascisme
Lien : https://lesmalheursdesophisme.blogspot.com/2020/11/anticommunisme-islamophobie-fascisme.html
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