jeudi 19 octobre 2017

21. Le trader et le professeur

Quelques remarques à propos d’une scène du film The Party


Classement : économie




Une scène du film de Sally Potter, The Party, décrit une altercation entre un professeur d’université plutôt âgé et mal en point et un jeune trader en forme mais plus ou moins déjanté. Le professeur évoque le caractère malsain du métier du trader ; celui-ci réagit assez véhémentement, accusant le professeur de gagner lui aussi de l’argent, donc de participer à la corruption qu’il dénonce verbalement.
Cette idée que l’argent gagné par les traders est ni plus ni moins sale ou propre que celui gagné par d’autres personnes est-elle exacte ? Dès lors bien sûr que l’on accepte le principe de la monnaie. Les traders sont-ils des travailleurs comme les autres ?

Comment un professeur d’université est-il rémunéré ?
Le circuit de l’argent gagné par un professeur d’université est clair : pour faire simple, dans le cas de la France, l’Etat prélève des impôts et rémunère grâce à eux les professeurs d’université (entre autres) ; en échange de cette rémunération, le professeur fournit un travail reconnu socialement.

Comment un travailleur de l’industrie automobile est-il rémunéré ?
Un circuit plus complexe apparaît dans d’autres secteurs, par exemple l’industrie automobile (ou toute autre industrie). La rémunération des travailleurs d’une entreprise de l’industrie automobile n’est pas assurée par l’Etat, mais par le résultat de la vente des produits de l’entreprise. 
La production automobile nécessite un certain nombre d’intrants (matières premières, énergie, usure des machines (amortissement), coût d’occupation de l’espace, coût d’organisation de l’espace de façon appropriée à l’activité, etc.) ; à ces intrants, les travailleurs de l’industrie automobile (catégorie incluant les cadres et gestionnaires) ajoutent par une série de transformations des matières premières une « valeur ajoutée » qui, si elle est correctement transformée en argent par la vente d’une quantité suffisante d’automobiles, permet 1) la rémunération de l’ensemble des agents participant au processus, 2) le paiement des impôts dus par l’entreprise, et 3) s’il reste quelque chose, la rémunération des gens qui ont fourni le capital, c'est-à-dire l’argent nécessaire au départ de l’entreprise ou à son extension (actionnaires). 
Parmi les travailleurs, les dirigeants  ont des niveaux de rémunération considérables (soit sous forme de salaire, soit sous forme d’octroi d’action), de l’ordre de celles des traders : mais la source de leur rémunération n’en est pas moins parfaitement claire. Ainsi que la source de la rémunération des actionnaires (toujours la valeur ajoutée par les travailleurs). En revanche, il peut y avoir une certaine obscurité en ce qui concerne la légitimation de ces rémunérations, mais c'est un autre sujet.

Comment les traders sont-ils rémunérés ?
Puisqu’ils ne sont pas rémunérés par l’Etat, ils le sont certainement grâce à une « valeur ajoutée », la valeur que par leur travail, ils ajoutent aux intrants nécessaires à leur activité.

Conclusion
La question qu'il faut poser est donc la suivante : Quelle valeur ajoutée est produite par un trader ? 
Mais aussi, pour clarifier : Quels sont les intrants de l'activité d'un trader ? Quelles transformations un trader fait-il subir à quelles matières premières ?
Ce n’est pas évident. Une autre page sera sans doute nécessaire pour analyser ce problème.



Création : 19 octobre 2017
Mise à jour :
Révision : 24 février 2019
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 21. Le trader et le professeur
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2017/10/le-trader-et-le-professeur.html








samedi 7 octobre 2017

20. Jean-Claude Milner et les profs

A propos d’une remarque de Jean-Claude Milner sur le statut des « profs »


Classement :





Ceci est un complément aux pages :

Référence
*Jean-Claude Milner et Philippe Petit, Considérations sur la France, Paris, Editions du Cerf, 2017, page 50.
Il s’agit d’un entretien entre les deux auteurs. 

Texte
Page 50, on peut lire la déclaration suivante du premier :
« Aujourd'hui, le mot prof’, réservé autrefois à l’argot des élèves, est devenu la désignation courante d’un corps de métier, mais certainement pas d’un corps intermédiaire. L’institution scolaire s’est polymérisée en communautés éducatives, où les enseignants ne peuvent être que minoritaires face aux parents et à l’administration. Dans l’enseignement secondaire, un prof n’est rien devant un élève, moins que rien devant les parents, moins que moins que rien devant son chef d’établissement. Pour abréger, je laisse de côté l’enseignement supérieur, mais l’évolution est analogue. »

Commentaires
Jean-Claude Milner perçoit le caractère péjoratif du mot « prof ».
Je ne suis pas d’accord avec la hiérarchie qu’il indique. Je ne pense pas que la relation des enseignants et du chef d’établissement soit de ce type, en tout cas ce n’est pas du tout ce que j’ai connu (il y a moins de dix ans) ; les chefs d’établissements restent fondamentalement des professeurs.
Il est clair qu’il y a eu une dégradation vis-à-vis des élèves et des parents ; de là à dire « il n’est rien... », « il n’est moins que rien »…, c’est excessif.
En revanche, Jean-Claude Milner n’évoque pas d’autres instances tout aussi importantes : l’administration de l’Education nationale (hauts fonctionnaires rectoraux et ministériels, conseillers de cabinet, qui feraient tellement bien ce que les « profs » font tellement mal !) ; la Cour des Comptes (voir par exemple Le Figaro du 5 octobre 2017) ; le corps des journalistes, notamment « spécialistes de l’éducation » ; ainsi que que le corps des sociologues spécialistes de l’éducation et des déclarations médiatiques.
A l'heure actuelle, c'est le corps des journalistes qui utilise (hors conversation courante) le plus massivement le mot « prof ».



Création : 7 octobre 2017
Mise à jour :
Révision :
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 20) Jean-Claude Milner et les profs
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2017/10/jean-claude-milner-et-les-profs.html