vendredi 25 mai 2018

37. Le cas Sophie Rabau : Ulysse et les sophismes de Sophie

Sur une assertion de Mme Sophie Rabau à propos de L’Odyssée


Classement : littérature grecque ; féminisme 




Référence
*Sophie Rabau, « Des blancs qui en disent long », Le Nouveau Magazine Littéraire, n° 2, février 2018, pages 30-31
*Homère, L’Odyssée, Chant VI, traduction de Leconte de Lisle, dans Wikisource (lien)

L’auteur
Il est présenté par le magazine comme « enseignante-chercheuse à l’université Paris-III », auteur des ouvrages suivants : « B. comme Homère, L’Invention de Victor B., et tout récemment Carmen pour changer » (Victor B. = Victor Bérard).
Sur le site de l’université Paris-3 (lien), on apprend qu’il est « directeur de recherche en littérature comparée ». Ses « domaines de recherche » sont définis comme suit: « Théorie littéraire et littérature antique gréco-latin[e], en particulier théorie de l'interprétation et de la philologie classique, théorie des textes possibles et critique créative, intertextualité. Poétique du récit. »

L'article : Rabau, Carmen et don José
Dans l’article dont elle est l’auteur, Rabau prétend découvrir que nombre d’héroïnes célèbres ont subi un viol occulté par l’auteur. Elle conclut en lançant un nouveau hashtag #balancetonporcdanslafiction, qui est, je suppose, un trait d’humour ; le reste de l’article semble tout à fait sérieux (ou elle cache bien son jeu).
Pour sa démonstration, elle s’appuie principalement sur Carmen de Prosper Mérimée, qu’elle analyse assez longuement. Etant donné que dans cette nouvelle, le narrateur (un Français voyageant en Espagne) reçoit les confidences de don José qui raconte l’histoire de ses relations avec Carmen, on peut admettre qu’à certains moments, don José puisse occulter certains faits gênants. Sophie Rabau analyse en particulier un épisode au cours duquel Carmen tombe d’un jour à l’autre dans un état de tristesse et de soumission à don José ; elle estime que la seule explication de ce changement, c’est que don José l’a violée, mais n’en dit évidemment rien au narrateur. Elle évoque, pour étayer ce point de vue, la description de son viol par Virginie Despentes il y a quelques années.
Ce point peut être soumis à discussion ; il faudrait cependant voir si l’auteur, Mérimée, a disposé des indices corroborant réellement l’hypothèse de Rabau.
Ce qui va moins bien, c’est lorsque Rabau étend sa supposition à d’autres œuvres, notamment à l’Odyssée, chant VI, qui raconte la rencontre d’Ulysse naufragé avec Nausicaa, fille du roi des Phéaciens : elle présente ainsi cet épisode, juste après avoir « traité » le cas de Médée (qui a très certainement probablement été violée par Jason) :

Texte 1 : Sophie Rabau sur la rencontre d'Ulysse et Nausicaa
Ce court passage consacré à L’Odyssée est mis en exergue par le magazine :

Critique
Cette dernière phrase, produit, je suppose, de la rédaction, ne tient pas debout : il aurait fallu écrire : « Quand il raconte que Nausicaa tombe sur Ulysse, nu, Homère aurait-il oublié de dire quelque chose ? »
Mais Rabau n’est pas en reste sur le plan rédactionnel. Plutôt que « Homère aurait-il oublié de dire quelque chose ? », elle aurait dû écrire « Homère n’aurait-il pas oublié de dire quelque chose ? » (au point du vue de Rabau : « je pense qu’il n’a pas tout dit », correspond « n’aurait-il pas oublié de dire quelque chose ? » alors que c'est à « je pense qu’il a tout dit » que correspondrait « aurait-il oublié de dire quelque chose ?).
Par ailleurs, en écrivant « Elle se contente de lui parler… ? », Rabau semble insinuer que Nausicaa ne s’est pas contentée de paroles, que c’est elle qui a profité de la nudité d’Ulysse et non pas Ulysse qui a profité de l’isolement de Nausicaa : « Elle se contente de lui parler alors que ses amies s’enfuient en courant ? N’en aurait-elle pas profité pour se faire dépuceler par Ulysse ? ». Ce n'est bien sûr pas ce que Rabau veut dire (puisque la Femme ne peut être que victime de la violence violeuse de l'Homme) : elle s'est trompé de « sujet » (grammatical), elle aurait dû écrire : « Il [Ulysse] se contente de lui parler alors que les amies de Nausicaa s'enfuient en courant ? » (ces phrases formellement affirmatives, mais en fait interrogatives, font très « Touche pas à mon poste ! »). 
Notons en passant que la phrase « Il ne lui arrive vraiment rien ? » peut s'appliquer à Ulysse autant qu'à Nausicaa ! (Dans ce cas, « lui »  (une sorte de datif) est aussi bien masculin que féminin, alors qu'au nominatif apposé, « lui » renvoie au genre masculin par opposition à « elle » (« lui, il a dit que... », « elle, elle a dit que... »). Sans oublier « Lui » - titre d'un magazine -, qui renvoie catégoriquement à un individu de sexe masculin !).
Enfin, il faut ajouter que, dans le récit d’Homère, ce n’est pas Nausicaa qui « tombe sur Ulysse, complètement nu », mais Ulysse qui sort de son abri et se présente au groupe des jeunes filles (Nausicaa et ses servantes), en « suppliant » (au sens grec), effectivement nu, mais prenant soin de cacher son sexe avec des branchages.
On voit donc que Rabau réussit à commettre plusieurs sottises en seulement quelques lignes. Cela n’a rien d’étonnant, étant donné que son interprétation de ce passage du Chant VI de L’Odyssée est inepte ! Il suffit de lire le texte d'Homère pour le constater.

Texte 2 : extrait du chant VI de l’Odyssée
Je reproduis ci-dessous l'épisode mis en cause par Rabau ; intertitres (gras, italique) de moi ; en gras : phrase indiquant que l'hypothèse d'un Ulysse violeur est absurde.
« Nausicaa et les servantes vont aux lavoirs à l’embouchure du fleuve
Nausicaa apporta de sa chambre ses belles robes, et elle les déposa dans le char. Et sa mère enfermait d'excellents mets dans une corbeille, et elle versa du vin dans une outre de peau de chèvre. La jeune vierge monta sur le char, et sa mère lui donna dans une fiole d'or une huile liquide, afin qu'elle se parfumât avec ses femmes. Et Nausicaa saisit le fouet et les belles rênes, et elle fouetta les mulets afin qu'ils courussent ; et ceux-ci, faisant un grand bruit, s'élancèrent, emportant les vêtements et Nausicaa, mais non pas seule, car les autres femmes allaient avec elle.
Et quand elles furent parvenues au cours limpide du fleuve, là où étaient les lavoirs pleins toute l'année, car une belle eau abondante y débordait, propre à laver toutes les choses souillées, elles délièrent les mulets du char, et elles les menèrent vers le fleuve tourbillonnant, afin qu'ils pussent manger les douces herbes. Puis, elles saisirent de leurs mains, dans le char, les vêtements qu'elles plongèrent dans l'eau profonde, les foulant dans les lavoirs et disputant de promptitude. Et, les ayant lavés et purifiés de toute souillure, elles les étendirent en ordre sur les rochers du rivage que la mer avait baignés. Et s'étant elles-mêmes baignées et parfumées d'huile luisante, elles prirent leur repas sur le bord du fleuve. Et les vêtements séchaient à la splendeur d’Hélios.
Après que Nausicaa et ses servantes eurent mangé, elles jouèrent à la balle, ayant dénoué les bandelettes de leur tête. Et Nausicaa aux beaux bras commença une mélopée. Ainsi Artémis marche sur les montagnes, joyeuse de ses flèches, et, sur le Taygète escarpé ou l'Erymanthe, se réjouit des sangliers et des cerfs rapides. Et les Nymphes agrestes, filles de Zeus tempétueux, jouent avec elle, et Léto se réjouit dans son cœur. Artémis les dépasse toutes de la tête et du front, et on la reconnaît facilement, bien qu'elles soient toutes belles. Ainsi la jeune vierge brillait au milieu de ses femmes.

Ulysse se réveille et voit Nausicaa et ses servantes
Mais quand il fallut plier les beaux vêtements, atteler les mulets et retourner vers la demeure, alors Athéna, la déesse aux yeux clairs, eut d'autres pensées, et elle voulut qu'Ulysse se réveillât et vît la vierge aux beaux yeux, et qu'elle le conduisît à la ville des Phéaciens. Alors, la jeune reine jeta une balle à l'une de ses femmes, et la balle s'égara et tomba dans le fleuve profond. Et toutes poussèrent de hautes clameurs, et le divin Ulysse s'éveilla. Et, s'asseyant, il délibéra dans son esprit et dans son cœur :
— Hélas ! À quels hommes appartient cette terre où je suis venu ? Sont-ils injurieux, sauvages, injustes, ou hospitaliers et leur esprit craint-il les Dieux ? J'ai entendu des clameurs de jeunes filles. Est-ce la voix des Nymphes qui habitent le sommet des montagnes et les sources des fleuves et les marais herbus, ou suis-je près d'entendre la voix des hommes ? Je m'en assurerai et je verrai.

Ulysse se présente, les servantes s’enfuient
Ayant ainsi parlé, le divin Ulysse sortit du milieu des arbustes, et il arracha de sa main vigoureuse un rameau épais afin de voiler sa nudité sous les feuilles. Et il se hâta, comme un lion des montagnes, confiant dans ses forces, marche à travers les pluies et les vents. Ses yeux luisent ardemment, et il se jette sur les bœufs, les brebis ou les cerfs sauvages, car son ventre le pousse à attaquer les troupeaux et à pénétrer dans leur solide demeure. Ainsi Ulysse parut au milieu des jeunes filles aux beaux cheveux, tout nu qu'il était, car la nécessité l’y contraignait. Et il leur apparut horrible et souillé par l'écume de la mer, et elles s'enfuirent, çà et là, sur les hauteurs du rivage. Et, seule, la fille d'Alkinoos resta, car Athéna avait mis l'audace dans son cœur et chassé la crainte de ses membres. Elle resta donc seule en face d'Ulysse.
Et celui-ci délibérait, ne sachant s'il supplierait la vierge aux beaux yeux, en saisissant ses genoux, ou s'il la prierait de loin, avec des paroles flatteuses, de lui donner des vêtements et de lui montrer la ville. Et il vit qu'il valait mieux la supplier de loin par des paroles flatteuses, de peur que, s'il saisissait ses genoux, elle s'irritât dans son esprit. Et, aussitôt, il lui adressa ce discours flatteur et adroit :

Adresse d’Ulysse à Nausicaa
— Je te supplie, ô Reine, que tu sois Déesse ou mortelle ! Si tu es Déesse, de celles qui habitent le large Ouranos, tu me sembles Artémis, fille du grand Zeus, par la beauté, la stature et la grâce ; si tu es une des mortelles qui habitent sur la terre, trois fois heureux ton père et ta mère vénérable ! Trois fois heureux tes frères ! Sans doute leur âme est pleine de joie devant ta grâce, quand ils te voient te mêler aux chœurs dansants ! Mais plus heureux entre tous celui qui, te comblant de présents d'hyménée, te conduira dans sa demeure ! Jamais, en effet, je n'ai vu de mes yeux un homme aussi beau, ni une femme aussi belle, et je suis saisi d'admiration. Une fois, à Délos, devant l'autel d'Apollon, je vis une jeune tige de palmier. J'étais allé là, en effet, et un peuple nombreux m'accompagnait dans ce voyage qui devait me porter malheur. Et, en voyant ce palmier, je restai longtemps stupéfait dans l'âme qu'un arbre aussi beau fût sorti de terre. Ainsi je t'admire, ô femme, et je suis stupéfait, et je tremble de saisir tes genoux, car je suis en proie à une grande douleur. Hier, après vingt jours, je me suis enfin échappé de la sombre mer. Pendant ce temps-là, les flots et les rapides tempêtes m'ont entraîné de l'île d'Ogygie, et voici qu'un Dieu m'a poussé ici, afin que j'y subisse encore peut-être d'autres maux, car je ne pense pas en avoir vu la fin, et les Dieux vont sans doute m'en accabler de nouveau. Mais, ô reine, aie pitié de moi, car c'est vers toi, la première, que je suis venu, après avoir subi tant de misères. Je ne connais aucun des hommes qui habitent cette ville et cette terre. Montre-moi la ville et donne-moi quelque lambeau pour me couvrir, si tu as apporté ici quelque enveloppe de vêtements. Que les Dieux t'accordent autant de choses que tu en désires : un mari, une famille et une heureuse concorde ; car rien n'est plus désirable et meilleur que la concorde à l'aide de laquelle on gouverne sa famille. Le mari et l'épouse accablent ainsi leurs ennemis de douleurs et leurs amis de joie, et eux-mêmes sont heureux.

Réponse de Nausicaa
Et Nausicaa aux bras blancs lui répondit :
— Étranger, — car, certes, tu n'es semblable ni à un lâche, ni à un insensé, — Zeus Olympien dispense la richesse aux hommes, aux bons et aux méchants, à chacun, comme il veut. C'est lui qui t'a fait cette destinée, et il faut la subir patiemment. Maintenant, étant venu vers notre terre et notre ville, tu ne manqueras ni de vêtements, ni d'aucune autre des choses qui conviennent à un malheureux qui vient en suppliant. Et je te montrerai la ville et je te dirai le nom de notre peuple. Les Phéaciens habitent cette ville et cette terre, et moi, je suis la fille du magnanime Alkinoos, qui est le premier parmi les Phéaciens par le pouvoir et la puissance.
Elle parla ainsi et commanda à ses servantes aux belles chevelures :

Nausicaa rappelle ses servantes et leur confie Ulysse
— Venez près de moi, servantes. Où fuyez-vous pour avoir vu cet homme ? Pensez-vous que ce soit quelque ennemi ? Il n'y a point d'homme vivant, et il ne peut en être un seul qui porte la guerre sur la terre des Phéaciens, car nous sommes très chers aux Dieux immortels, et nous habitons aux extrémités de la mer onduleuse, et nous n'avons aucun commerce avec les autres hommes. Mais si quelque malheureux errant vient ici, il nous faut le secourir, car les hôtes et les mendiants viennent de Zeus, et le don, même modique, qu'on leur fait, lui est agréable. C'est pourquoi, servantes, donnez à notre hôte à manger et à boire, et lavez-le dans le fleuve, à l'abri du vent.
Elle parla ainsi, et les servantes s'arrêtèrent et s'exhortèrent l'une l'autre, et elles conduisirent Ulysse à l'abri du vent, comme l'avait ordonné Nausicaa, fille du magnanime Alkinoos, et elles placèrent auprès de lui des vêtements, un manteau et une tunique, et elles lui donnèrent l'huile liquide dans la fiole d'or, et elles lui commandèrent de se laver dans le courant du fleuve. Mais alors le divin Ulysse leur dit :
— Servantes, éloignez-vous un peu, afin que je lave l'écume de mes épaules et que je me parfume d'huile, car il y a longtemps que mon corps manque d'onction. Je ne me laverai point devant vous, car je crains, par respect, de me montrer nu au milieu de jeunes filles aux beaux cheveux.
Il parla ainsi, et, se retirant, elles rapportèrent ces paroles à la vierge Nausicaa. »

Analyse
Si on revient au titre de l'article de Rabau, on constate facilement que le récit d'Homère ne comporte absolument aucun « blanc » en ce qui concerne Ulysse et Nausicaa. Rien dans ce texte ne permet par conséquent de penser qu’Ulysse attente en quoi que ce soit à Nausicaa : au contraire, Homère prend soin de nous signaler qu'Ulysse prend la décision de ne pas lui toucher les genoux (quoique ce soit un élément rituel dans le cas d’un suppliant), et de lui parler de loin, afin d’éviter toute équivoque (en fait, 2750 ans avant l'affaire Weinstein, il redoute être soupçonné d'agression sexuelle !).
Dans la mesure où « Homère » narre une pure fiction, et où les « indices » qu’il donne sont parfaitement clairs, il n’y a aucune raison de supposer qu’il « n’aurait pas tout dit ». La fiction homérique suppose de surcroît la présence auprès des hommes d’êtres divins, qui en savent long, Athéna dans ce passage, protectrice à la fois d'Ulysse et  de Nausicaa !
Quant à imaginer que, dans la réalité, un naufragé jeté sur une côte et rencontrant un groupe de jeunes filles n’aurait rien de plus pressé que de violer l’une d’entre elles si ses compagnes s’étaient enfuies, cela relève de l’anthropologie haasienne (un homme sur trois est un violeur). On imagine l’accueil chaleureux qu’il recevrait des gens du pays !

Conclusion
Elle est claire : dans ce passage prétentieux et nul, Sophie Rabau a écrit n’importe quoi.

Ajout (6 novembre 2018)
Sur France Culture, Barbara Cassin, invitée de La Grande Table à 13 h, évoque la déclaration d'Ulysse à Nausicaa comme exemple de discours performatif (Ulysse ne veut pas toucher les genoux de Nausicaa, mais il déclare le faire [cela ne correspond pas à la traduction ci-dessus. Point à voir.] En tout cas, elle n'a absolument évoqué l'idée qu'Ulysse pourrait avoir violé Nausicaa.



Création : 25 mai 2018
Mise à jour : 10 septembre 2018
Révision : 6 novembre 2018
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 37. Le cas Sophie Rabau : Ulysse et les sophismes de Sophie
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2018/05/ulysse-et-les-sophismes-de-sophie.html








jeudi 24 mai 2018

36. Critique de l'islamophobophobie

A propos du discours d’une islamophile sur la prétendue islamophobie


Classement : islam ; « islamophobie »




Référence
*Nikola Tietze, « Critique de l’islamophobie », dans Michel Wieworka et alii, Antiracistes, Paris, Robert Laffont, 2017, pages 153-162

L’auteur
Selon le site de l’EHESS (lien), « Nikola Tietze est chercheur associée au CADIS et collaboratrice scientifique au Hamburger Institut für Sozialforschung depuis 2000 (Thèse en co-tutelle EHESS/CADIS Paris et Philipps Universität Marburg en 1999). ».
Pas « chercheuse », ni « chercheresse » ?

Texte
Je reproduis le début de l’article :
« L’islamophobie, un symptôme occidental basé sur la stigmatisation et la peur d’une religion
L’islamophobie désigne un rejet, une haine des institutions religieuses de l’islam, du dogme religieux et de la pratique religieuse. Par ailleurs, l’utilisation de ce terme caractérise en général également le rejet des musulmans en tant que personnes. Dans ce cas, le discours islamophobe est souvent construit sur des amalgames entre le terrorisme et la pratique religieuse quotidienne »..

Analyse
Ainsi, l’islamophobie serait à la fois
*le rejet de l’islam
*la haine de l’islam
*le « rejet des musulmans en tant que personnes » [« en tant que musulmans » serait plus logique, mais passons].
Il serait le résultat à la fois :
*de la stigmatisation de l’islam
*de la peur de l’islam
*d’amalgames entre le terrorisme et l’islam.
Pour Madame Tietze, le « rejet », c’est la même chose que la « haine » ; il me semble pourtant qu’on peut refuser l’instauration des « institutions religieuses de l’islam » (charia, etc.), tant à titre collectif que personnel, donc les « rejeter », sans avoir besoin les « haïr »*. Par contre, il ne fait pas de doute qu’il y a des gens qui haïssent l’islam et les musulmans ; ce n’est pas la même chose (« Pas d’amalgame ! »).
Il me semble aussi que l’« islamophobie » pourrait certes résulter de la « peur de l’islam », mais que la « stigmatisation » de cette religion serait plutôt un résultat de l’ « islamophobie ».

Conclusion
Les cinq premières lignes de ce pensum indiquent très clairement qu’elle écrit n’importe quoi, ce qui est logique, du reste, puisque le concept d’ « islamophobie » relève du grand n’importe quoi intellectuel (mais c’est tellement « inclusif » !).
Noter aussi les marques d'indétermination (« en général », « souvent »).

Notes
*Haïr : curieux, cette utilisation galvaudée du concept de « haine » par les islamophobophobes, comme Plenel (« ils ont beau me haïr, ils ne m’apprendront pas la haine ») et les signataires de l’appel des 130 (« une couverture haineuse et diffamatoire », « la haine ne peut être excusée par l’humour »). En l’occurrence, la une de Charlie Hebdo sur la moustache à Plenel n’indiquait pas la moindre « haine », mais la volonté claire et nette de ridiculiser son propriétaire.
*islamophobophobie : le fait d’être obsédé par la soi-disant islamophobie des gens qui ont de l’islam une opinion différente et de les condamner sous ce prétexte fallacieux

Suite du texte
« La différence entre ces deux significations est certes faible, mais il est important de considérer ces deux aspects afin de mieux saisir les implications sociales de l’islamophobie et les problèmes que l’utilisation du terme pose pour dénoncer le racisme.
Le mot « islamophobie » met l’accent sur les peurs de ceux qui rejettent l’islam comme système religieux et les musulmans. A travers ces peurs, le discours islamophobe construit un groupe musulman homogène. Il gomme la pluralité des pratiques religieuses et les façons de se dire musulman. Pourtant il existe de nombreuses façons d’être musulman ou de se comprendre soi-même comme musulman.
Au niveau international, dans des institutions comme l’ONU ou le Conseil de l’Europe, le terme « islamophobie » est utilisé pour dénoncer non seulement le rejet du monde musulman, mais également le revers de ce rejet – la construction d’une culture européenne essentiellement basée sur le christianisme. Dans le cadre de déclaration, d’évaluation d’action publique ou de financement de programmes éducatifs, ces institutions critiquent, à l’aide de l’utilisation du terme, l’idée que deux mondes de cultures religieuses opposées et incompatibles existent.
Néanmoins, en dénonçant l’islamophobie ou en analysant les rapports sociaux racistes en termes d’islamophobie, nous risquons de reproduire la construction des mondes homogènes et antagonistes et de réduire des discriminations et des stigmatisations à des troubles psychologiques de ceux qui les réalisent. Cela revient, entre autres, à oublier les victimes de pratiques antimusulmanes dans les pays européens, comme la France ou l’Allemagne. »

Analyse et commentaire
Mme Tietze n’arrive décidément  pas à mettre au clair la signification du mot « islamophobie ».
En revanche, ce qui est clair, c'est que les islamophobophobes (dont elle fait manifestement partie) utilisent l’accusation d’islamophobie à tort et à travers. Ils n’ont donc pas besoin d’une définition claire, au contraire : définition qui exigerait d'abord de séparer catégoriquement ce qui est pensé de l'islam (religion musulmane) et ce qui est pensé au sujet des musulmans ; et de distinguer catégoriquement ce qui relève de la « haine » de ce qui relève de la « peur » ou de la « méfiance ». 
En ce qui concerne les musulmans, il y en a de sympathiques, mais il y en a aussi d'antipathiques, voire de haïssables. 
En ce qui concerne l'islam (que certains adeptes, que l'on peut appeler islamistes, voudraient voir devenir une nouvelle religion dominante), il n'y a pas lieu de le traiter de façon différente du catholicisme (ancienne religion dominante en France) : il doit se soumettre. 
Du reste, certains catholiques et même certains protestants (Baubérot par exemple), mécontents que la religion en général soit à leur avis trop « privatisée » en France, se mettent à la remorque des exigences islamistes en espérant que leur propre chapelle en profitera (dans le cadre d'un statut de dhimmis, sans doute !).
Mais il est étonnant que des gens « de gauche » fassent la même chose, choisissant au nom du soutien aux « plus démunis »  (dans la lignée de Todd, par exemple), de soutenir l'islam contre la laïcité, ou plutôt, dans l'islam, les positions réactionnaires (Frères musulmans et autres activistes) au détriment des positions laïques. Ce sont ces islamistophiles soi-disant de gauche qui utilisent de façon perverse le terme d'« islamophobie », de concert avec leur amis les islamistes (voir l'amitié qui s'était établie entre Plenel et Ramadan), qui eux sont parfaitement conséquents. 
Face à cette « Sainte Alliance », il faut donc être un islamistophobe conséquent.



Création : 24 mai 2018
Mise à jour : 10 juillet 2019 (création du concept d'isllamistophobie)
Révision :
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 36. Critique de l'islamophobophobie
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2018/05/critique-de-lislamophobophobie.html








vendredi 18 mai 2018

35. Fuck la Fac !

A propos de l’utilisation de l’apocope « fac » dans les médias


Classement : philologie française




Ceci est un prolongement des pages consacrées à l’utilisation par les médias de l’apocope « prof » : Graves incivilités à Bordeaux, Déchaînement anti-profs et Les profs sont partout en 2017.

Exposé des motifs
De même que le journaliste français bon teint a une sorte de phobie pour le mot « professeur », il ne supporte pas non plus le mot « université », dont le nombre de syllabe dépasse sans doute la capacité de son temps de cerveau disponible. Ou bien peut-être croit-il prouver qu’il est affranchi en utilisant ce terme semi-argotique « fac » (le cave se rebiffe !). A moins qu'il opère un amalgame avec les « fac news ».
Cette page est donc destinée à accueillir quelques exemples de cet usage si « absolument moderne ».

Quelques amateurs de fac news
*Marianne, 18 mai 2018, page 22, « Voltaire, reviens, ils sont devenus fous ! », de Jack Dion
Remarquer aussi la légèreté de la formulation « la fac de Paris-IV Sorbonne » (au lieu de « l'université Paris-IV Sorbonne »)

*France Inter, 29 janvier 2019journal de 13 heures, 
Une intervenante parle de la « fac Paris-Descartes », puis y revient quelques instants après en signalant ce qui se passe d'intéressant « dans cette fac ».




Création : 18 mai 2018
Mise à jour : 29 janvier 2019
Révision : 29 janvier 2019
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 35. Fuck la Fac !
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2018/05/fuck-la-fac.html