Classement :
islam ; islamisme ; critique de l'islam
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Introduction
Fin janvier 2016, une tribune de l’écrivain algérien,
consacrée aux événements de Cologne (31 décembre 2015-1° janvier 2016). Ces
événements font l’objet d’une polémique, en France comme en Allemagne et dans
d’autres pays ; la tribune de Kamel Daoud (algérien laïc vivant et
écrivant en Algérie) va faire l’objet d’une polémique spécifique, à travers la
réponse, parue quelques jours après, de plusieurs intellectuels qui l’accusent
entre autres d’islamophobie,.
Après avoir présenté la tribune de Kamel Daoud puis le
texte qui lui est hostile, je résume et j’analyse ci-dessous cette seconde
tribune.
Références
*Kamel
Daoud, « Cologne, lieu de fantasmes », Le Monde, 31
janvier 2016, disponible en ligne (lien)
*Collectif, « Nuit de Cologne : « Kamel Daoud
recycle les clichés orientalistes les plus éculés » », Le Monde, 11
février 2016 (lien)
Résumé de la tribune
Après une introduction purement rhétorique
(dépourvue de tout élément factuel) fortement dépréciative à l’encontre de la
personne et du texte de Kamel Daoud, les auteurs étudient les « trois
logiques » qui, selon eux, régissent sa tribune :
1) l’essentialisation du monde musulman et de
l’Occident
2) une psychologisation des actes commis à Cologne
3) une volonté d’imposer aux réfugiés une discipline
afin de les rendre conformes aux valeurs de l’Occident.
Mais un tel résumé est insuffisant parce que
l’argumentation est constamment parasitée par une rhétorique de dépréciation.
Plan de l’analyse
A) Les événements de Cologne selon le Collectif
B) Kamel Daoud selon le Collectif
1) Remarques positives
2) Remarques dépréciatives
3) Les formules dépréciatives dans la tribune de Kamel Daoud
3) Les formules dépréciatives dans la tribune de Kamel Daoud
C) L’argumentation du Collectif (à venir)
Analyse
A) La présentation des faits par le collectif
Dans l’ensemble, le Collectif n’essaie pas de
présenter les événements de Cologne comme anodins :
« Face à l’ampleur de violences inédites, il faut sans aucun doute se pencher sur les
faits »
« le débat apaisé et approfondi que requiert la gravité des faits »
« un fait divers gravissime »
On trouve cependant une notation de style
« excusiste » :
« Psychologiser de la sorte les violences
sexuelles est doublement problématique. […], c’est effacer les conditions
sociales, politiques et économiques qui favorisent ces actes (parlons de l’hébergement des réfugiés ou
des conditions d’émigration qui encouragent la prédominance des jeunes hommes). ».
Cette remarque est sans doute fondée, mais pas pertinente pour autant (une situation générale ne convenant pas pour étudier un fait ponctuel).
Cette remarque est sans doute fondée, mais pas pertinente pour autant (une situation générale ne convenant pas pour étudier un fait ponctuel).
B) Kamel Daoud dans la tribune du collectif
Dans l’ensemble, Kamel Daoud (« Daoud ») n’est
pas présenté sous un très bon angle dans cette tribune ; j’ai cependant
trouvé des éléments positifs, dont la présence n’est pas très cohérente avec le
reste (négligences dans la correction ?).
1) Remarques positives
a) « Après d’autres écrivains algériens comme Rachid Boudjedra
ou Boualem Sansal, Kamel Daoud intervient en tant qu’intellectuel laïque
minoritaire dans son pays, en lutte quotidienne contre un puritanisme parfois
violent. »
b) « il faut sans aucun doute se pencher sur les
faits, comme le suggère Kamel Daoud. » [noter dans ces deux cas l’emploi
du prénom]
2) Remarques dépréciatives
a) « humaniste
autoproclamé » |noter que le
mot « humaniste » n’est employé qu’une fois par Kamel Daoud : « [le réfugié] est la victime qui
recueille la projection de l’Occidental ou son sentiment de devoir humaniste ou
de culpabilité » ! Le
Collectif se réfère ici à un point de vue des médias français qui considèrent Kamel Daoud comme un « humaniste » ; je ne sais pas si Kamel Daoud s'est jamais « autoproclamé » « humaniste ».]
b) « lieux communs navrants »
c) « [il] recycle
les clichés orientalistes les plus éculés, de l’islam religion de mort
cher à Ernest Renan (1823-1892) à la psychologie des foules arabes de Gustave
Le Bon (1841-1931). » (pas moins de trois termes péjoratifs :
« recycler », « clichés », « éculés ») [est-ce
que cela se trouve vraiment chez Renan et Le Bon ? Aucune preuve. Aucune
citation. Or Renan et Le Bon ne sont pas des auteurs lus, ni très connus, en France à l’heure
actuelle]
d) « l’argumentation de Daoud ne fait qu’alimenter les fantasmes islamophobes
d’une partie croissante du public européen » [on pourrait cependant
imaginer que la propagande de Daech avait à l’époque une influence au moins
aussi importante pour inciter à « la peur de l’islam », sans parler
des attentats de l’année 2015 en France et dans d’autres pays, à moins qu’il ne
s’agisse de « fantasmes »]
e) « [son] texte repose
sur trois logiques qui, pour être
typiques d’une approche culturaliste que de nombreux chercheurs critiquent
depuis quarante ans, n’en restent pas moins dangereuses » [référence probable aux travaux d’Edouard
Said ; mais encore aucune citation. En quoi ces travaux s’appliquent au
cas traité ?]
f) « marqué par son expérience durant la guerre
civile algérienne (1992-1999), Daoud ne
s’embarrasse pas de nuances » [[il devrait
pourtant être reconnaissant de ne pas avoir été zigouillé dans les années 1990]
g) « vision asociologique qui crée de toutes
pièces un espace inexistant »
h) « Pegida n’en demandait pas tant. »
[là encore, il me semble que Pegida n’a pas fondé son point de vue anti-musulman
sur les écrits de qui que ce soit ; le Collectif emploie probablement « Pegida »
comme pré-synonyme de « nazi »]
i) « ce projet est scandaleux, non pas seulement du fait de l’insupportable routine de
la mission civilisatrice et de la supériorité des valeurs occidentales qu’il
évoque »
j) « conditionner l’accueil de personnes qui
fuient la guerre et la dévastation. En cela, c’est un discours proprement anti-humaniste, quoi qu’en dise Daoud »
k) « dans le contexte européen,
il épouse toutefois une islamophobie
devenue majoritaire. Derrière son cas, nous nous alarmons de la tendance
généralisée dans les sociétés européennes à racialiser ces violences sexuelles. » [noter l’amalgame entre « peur
de l’islam » et « racisme » : preuve du caractère « pourri » du concept d’« islamophobie »]
l) « banalisation des discours racistes affublés des oripeaux d’une pensée humaniste qui ne
s’est jamais si mal portée. Nous nous alarmons de voir un fait divers
gravissime servir d’excuse à des propos
et des projets gravissimes. »
m) « réactualiser les mêmes sempiternels clichés islamophobes »
Fichtre !
3) Les formules dépréciatives dans
la tribune de Kamel Daoud
Relisons la tribune de Kamel
Daoud.
Si celui-ci utilise des termes dépréciatifs, c’est en moins grand nombre et de façon plus discrète. A proprement parler, Kamel Daoud ne profère aucune injure, même contre les islamistes (qu’il déteste pourtant manifestement) ; il ne les traite même pas d’ « anti-humanistes »… Il désigne Daech comme « l’organisation Etat islamique », formule qui ne me paraît pas injurieuse. Il écrit « L’islamiste n’aime pas la vie », ce qui peut se discuter, mais n’est pas non plus injurieux.
Si celui-ci utilise des termes dépréciatifs, c’est en moins grand nombre et de façon plus discrète. A proprement parler, Kamel Daoud ne profère aucune injure, même contre les islamistes (qu’il déteste pourtant manifestement) ; il ne les traite même pas d’ « anti-humanistes »… Il désigne Daech comme « l’organisation Etat islamique », formule qui ne me paraît pas injurieuse. Il écrit « L’islamiste n’aime pas la vie », ce qui peut se discuter, mais n’est pas non plus injurieux.
On trouve un passage extrêmement violent : « ce porno-islamisme dont font discours les prêcheurs
islamistes pour recruter leurs « fidèles » : descriptions d’un paradis plus
proche du bordel que de la récompense pour gens pieux, fantasme des vierges
pour les kamikazes, chasse aux corps dans les espaces publics, puritanisme des
dictatures, voile et burka » ; est-ce que « porno-islamisme »
est pour autant une injure ? (peut-être le serait « porno-islamiste ! »,
mais « porno-islamisme » est un concept, pas une adresse verbale.
On trouve aussi : « L’islamisme est un attentat contre le désir », ce qui est peut-être
diffamatoire.
Conclusion
Alors que le texte de Kamel Daoud est, me
semble-t-il, neutre sur le plan de la rhétorique péjorative, les auteurs du
collectif utilisent de nombreux termes visant à le discréditer. C’est un peu
inquiétant pour la bonne tenue du débat.
A venir
*L’argumentation du Collectif
*Les membres du Collectif
Création : 24 juin 2018
Mise à jour :
Révision : 15 septembre 2018
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 42. La tribune contre Kamel Daoud : Analyse 1
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.com/2018/06/la-tribune-contre-kamel-daoud-analyse-1.html