Quelques remarques
sur ce que signifie poser ses godasses sur les sièges du RER, selon des sociologues
Classement : confusionnisme sociologique
Référence
*Serge
Paugam, Bruno Cousin, Camila Giorgetti et Jules Naudet, Ce que les riches pensent des pauvres, Paris, Le Seuil, 2017, page
122
Texte
« Quelques interviewés se plaignent du fait que certains
passagers, le plus souvent identifiés comme des hommes ou des jeunes garçons
des classes populaires, dégradent l’environnement du train en crachant par
terre dans les wagons ou à l’intérieur des stations, et en posant leurs pieds
sur les sièges (cette dernière attitude étant aussi parfois perçue, on le verra
ci-dessous, comme menaçante, du fait qu’elle est interprétée par les classes
supérieures des beaux quartiers comme un refus ostentatoire des règles
minimales d’urbanité, ce qui leur semble de mauvais augure en cas
d’interaction). »
Analyse
au pied de la lettre
Pour les auteurs de ces lignes, le fait que ces jeunes
posent leurs pieds sur les sièges (des trains) constitue donc une preuve
évidente (« ostentatoire ») de respect des règles élémentaires de
politesse, et un très bon augure sur le déroulement de la conversation, au cas
où il s’en produirait une !
Les riches (ces salopards) interprètent complètement de
travers l’attitude de ces jeunes gens, à qui on ne saurait reprocher ni
égoïsme, ni manque d’éducation.
Heureusement les sociologues sont là pour rétablir la
possibilité du « vivre ensemble » : les jeunes gens occuperont
deux sièges (dont un avec leurs pieds, ou plus exactement, leurs godasses) et les salopards resteront
debout, mais ne devront pas du tout se sentir vexés, humiliés ou en colère. Ils donneront
même volontiers du feu au jeune homme si celui-ci leur en demande.
Analyse
plus subtile
Est-ce cela que pensent nos quatre lascars, les quatre zauteurs de ce livre, tous sociologues dûment certifiés ?
Non.
C’est pourtant ce qu’ils sous-entendent, de façon quasi « ostentatoire ».
Mais ils ne le pensent pas.
Ce qu’ils pensent, c’est que l’attitude consistant à poser ses pieds
sur le fauteuil en face ne signifie pas CATÉGORIQUEMENT que ces jeunes le
fassent consciemment comme une transgression, ni qu’ils adopteront un
comportement hostile si on leur demande de libérer le siège.
Conclusion
De fait, il est possible que, sollicité (l'« interaction » envisagée plus haut), le jeune se fende d’un
grand sourire franc et sympa, et retire ses godasses en s’excusant (ou pas).
Mais il est aussi possible qu’il réponde : « Va
te faire foutre, je nique ta mère ! », ce qui n'est pas de très bon augure.
Personne ne sait ce qu’il fera.
En tout cas, en aucun cas il ne posera son cul à l’endroit où
il avait posé précédemment ses godasses, ni ne sortira son mouchoir pour essuyer le siège.
Et ni Paugam, ni Cousin, ni Giorgetti, ni Naudet, ne viendront le faire à sa place !
Et ni Paugam, ni Cousin, ni Giorgetti, ni Naudet, ne viendront le faire à sa place !
Création : 9 novembre 2017
Mise à jour :
Révision : 12 mars 2019
Auteur : Jacques Richard
Blog : Les Malheurs de Sophisme
Page : 23. Quand les sociologues se mettent les pieds
dans le plat
Lien : http://lesmalheursdesophisme.blogspot.fr/2017/11/les-sociologues-mettent-les-pieds-sur.html
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